Sous la Quatorzième Législature, le groupe écologiste déposa une proposition de loi pour introduire la proportionnelle aux législatives. Il y était défendu des listes paritaires, le seuil des 5% et le quotient électoral couplé de la plus forte moyenne.
Les écologistes se démarquaient avec des listes régionales, permettant un ancrage territorial (contrairement aux listes nationales) et les pluralisme et représentativité empêchés par les « effets de seuil éloignés du seuil légal de 5 %« , combinant ainsi les deux tendances défendues. A l’exception de la Corse et de l’outre-mer, au moins 18 députés auraient été élus dans chaque région, permettant une application entière.
Mercredi dernier, la Commission des Lois de l’Assemblée nationale a débattu de la proposition de loi déposée par le Député Bruno Bilde et plusieurs de ses collègues du Groupe Rassemblement National. Nous avions publié un article il y a deux semaines à ce sujet.
Ce texte, à retrouver ici, visait à modifier le mode de scrutin des députés en passant à une proportionnelle départementale comme ce fut le cas pour les élections législatives de 1986. Les débats en commission, à réécouter ici, ont été relativement courts puisque l’examen de cette PPL n’a duré qu’une courte heure. Cet examen s’inscrit dans le cadre de la niche parlementaire des députés du Rassemblement National, si bien qu’il n’y a aucune garantie que ce texte soit in fine débattu dans l’hémicycle.
Les échanges se sont majoritairement déroulés dans le cadre de la discussion générale, avec les prises de parole successives des représentants des différents groupes après une présentation de la proposition de loi par son rapporteur.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, nous pouvons déjà exprimer nos regrets sur les différentes prises de position des intervenants et des groupes pour lesquels ils étaient les porte-paroles. En effet, aucun groupe en dehors du Rassemblement National (qui avait donc déposé le texte) n’a soutenu cette proposition de loi. Une raison derrière ces regrets et ces reproches : nombre d’intervenants et donc de groupes soutiennent le principe proportionnel.
Au fil des interventions, nous n’avons pu que constater la récurrence de certaines remarques et de certains arguments. De nombreuses références ont été faites à la Constitution, aux précédents textes sur la proportionnelle, à la proximité avec les citoyens et les territoires, au besoin d’un débat plus large ou encore au fait que la proportionnelle serait un élément insuffisant pour redynamiser notre démocratie.
Revivifier la démocratie : un texte copier-coller insuffisant, prématuré et inapproprié pour les intervenants
Commençons tout d’abord par présenter rapidement cette proposition de loi : ce texte vise à instaurer une proportionnelle dite « intégrale » avec des listes paritaires départementales et un seuil de représentation fixé à 5%, sans panachage ou vote préférentiel. Trois grandes raisons ont été présentées par le rapporteur et une majorité d’intervenants sur ce qui pourrait motiver l’adoption de la proportionnelle : lutter contre l’abstention, permettre une meilleure représentation et rééquilibrer les pouvoirs en contrecarrant l’hyper-présidentialisme. A l’inverse, d’autres arguments sont venus pour critiquer le texte, comme le lien avec les territoires, ou pour motiver tout simplement l’opposition au texte comme son côté restreint et réducteur.
Un souci de méthodologie ?
Avant d’entrer dans le détail des causes, il nous faut indiquer le constat (et même la critique) posé par nombre d’intervenants : ce texte est un copier-coller de précédentes propositions de lois, déposées sous la précédente mandature par La France Insoumise et le MoDem. Cela a été le cas d’Emeline K/Bidi, de Jean-Louis Bricout et de Jérémie Iordanoff ce dernier déclarant ceci « Pourtant, vous reprenez là à l’identique, certains ont dit à l’aide de photocopieuse, les modalités de vote d’autres propositions de loi préalablement déposées par La France Insoumise ou par le MoDem. Vous êtes dans une forme de parasitisme, dans la manœuvre.« . Les groupes intéressés l’ont également noté par les voix d’Erwan Balanant et de Raquel Garrido.
D’autres interventions ont souligné un autre souci de « méthodologie » ou de « temporalité ». Il a été fait référence, à plusieurs reprises, à la commission transpartisane sur la refondation démocratique défendue par le Président Emmanuel Macron. Plusieurs députés ont déclaré que ce débat serait plus judicieux dans ce cadre. Sans surprise, ces interventions provenaient de la majorité-minorité présidentielle, comme le Député Horizons Didier Lemaire.
Toutefois, si nous pouvons entendre le fait qu’une niche n’est pas un cadre idéal (souligné par le Député LIOT, Jean-Louis Bricout pour qui « Soyons réalistes, bouleverser notre régime électoral à l’occasion d’une niche de groupe n’est ni réaliste ni souhaitable, c’est irraisonnable. » ajoutant plus tard, sur la fin de son intervention « Lui, le groupe LIOT pense que la question mérite d’abord un véritable débat, pas un échange à l’emporte-pièce et bien au contraire des discussions approfondies.« ), nous ne pouvons pas entendre le fait qu’un tel débat serait « prématuré».
Nous sommes en parfait désaccord avec son auteur, Gilles Le Gendre du Groupe Renaissance et souhaitons souligner que non seulement, l’Assemblée nationale a déjà débattu de textes sur la proportionnelle ces dernières années, et qu’il n’est jamais trop tôt pour débattre d’améliorations à notre démocratie. La proportionnelle est un sujet ancien, défendu par divers candidats aux élections présidentielles, notamment tous ceux ayant remporté les quatre derniers scrutins. De même considérer que le débat n’est pas « mûr » parce que la présidente du groupe ayant déposé la proposition de loi et ancienne candidate à la présidentielle ayant défendu la proportionnelle n’a pas cosigné le texte est un argument inapproprié et stupide.
Ce n’est pas assez !
A côté de la méthodologie et de la commission transpartisane, il a été fait référence à de très nombreuses reprises au caractère incomplet de la proposition de loi ou au fait que celle-ci ne suffirait pas. Nous pouvons citer député finistérien démocrate, Erwan Balanant, disant de la proportionnelle qu’elle est « une pièce de l’édifice » et que d’autres sujets doivent également êtres abordés « la décentralisation, la question de la démocratie participative, la question de l’engagement citoyen« . Il a par ailleurs cité la thématique du financement des partis politiques.
Emeline K/Bidi « contenu décevant« , Cécile Untermaier « ne peut suffire », ou encore Raquel Garrido sont allées dans le même sens. Une position également partagée par Gilles Le Gendre.
Abstention et représentation
Nombre d’intervenants ont abordé une question devenue malheureusement fondamentale des élections françaises, celle de l’abstention. Toutefois, tous n’ont pas exprimé le même point de vue sur les causes de l’abstention et sur les effets de l’introduction de la proportionnelle, plusieurs abordant également le sujet de la confiance des citoyens envers leurs élus, leurs représentants.
Parlons dans un premier temps de la juste représentation qui est un argument fondamental pour l’introduction de la proportionnelle (intégrale). Dans son intervention initiale, le rapporteur a indiqué que dans le cadre des auditions, les chercheurs consultés s’accordaient sur la corrélation entre abstention et mal-représentation. Des électeurs ne se rendraient pas aux urnes parce que la ou le candidat pour qui ils souhaiteraient voter n’a aucune chance de remporter le scrutin et que la personne qui remporterait l’élection ne serait pas celle qu’ils voudraient.
En effet, le scrutin majoritaire fait qu’une majorité d’électeurs du premier tour ne voient pas la personne pour qui ils ont voté remporter l’élection voire même accéder au second tour. En 2022, près de 10% des circonscriptions ont vu le candidat en tête dépasser les 40% et 15 dépassèrent même 50%. Si nous regardons le meilleur score obtenu au premier tour des législatives, celui d’Alexis Corbière dans la 7ème circonscription de Seine-Saint-Denis, 37,06% des votes valides ne se sont pas portés sur lui.
Ce raisonnement a été partagé par Yannick Favennec-Bécot et Béatrice Roullaud. Pour le premier, “L’introduction d’une dose de proportionnelle comme cela a déjà été proposé sous la précédente législature pourrait contribuer à lutter contre l’abstention.« . Issu du Groupe Horizons, il défendait un amendement visant à introduire une proportionnelle départementale uniquement dans les départements élisant douze députés ou plus.
Pour l’oratrice du Rassemblement National, Béatrice Roullaud, une transformation du mode de scrutin serait nécessaire « pour permettre à tous les français de se sentir représentés et donc concernés » puisqu’avec la proportionnelle, au sein d’une circonscription départementale (sauf exceptions), des électeurs ayant fait des choix différents pourraient tout de même voir une ou plusieurs candidatures de leurs choix aboutir, ce qui les inciterait donc à se déplacer.
Tous ne partagent pas l’opinion qu’introduire la proportionnelle réglerait la question de l’abstention. Avant de poursuivre sur ce sujet, l’élue insoumise Raquel Garrido avait déposé deux amendements sur le vote obligatoire (ce qui entraînerait une abstention quasiment nulle) et le vote blanc : « Oui le vote obligatoire est nécessaire pour que le corps électoral s’avance tout entier vers l’urne et si on a le droit de voter blanc, si le vote blanc peut empêcher une élection alors tout ça fait beaucoup de sens ». Ceux-ci ont néanmoins été déclarés irrecevables. Pour revenir à la question de l’abstention, Jean-Louis Bricout est extrêmement sceptique sur les effets qu’auraient la proportionnelle à ce sujet.
Partis, confiance et crise démocratique
La crise démocratique n’a pas été abordée uniquement sous l’angle de l’abstention. Diverses interventions se sont appesanties sur les partis politiques et la crise de confiance entre ceux-ci et les électeurs et ces derniers envers les élus.
Nous avons par exemple Cécile Untermaier, porte-parole pour le Groupe Socialiste du texte, qui soulignait que passer de candidatures individuelles à des listes ne ferait que renforcer le pouvoir des partis et que ceux-ci n’ont pas « la confiance du peuple« . Bien que défendant le principe proportionnel, elle a exprimé son scepticisme, effectuant un parallèle avec les élections régionales « Je ne crois pas personnellement que les listes en cours pour les régionales, avec des accords entre les formations politiques soient le reflet d’une qualité et d’une écoute citoyenne et d’une bonne représentativité« .
Ce désamour des citoyens pour les partis a également été avancé par une autre élue de gauche, Emeline K/Bidi « Or les français se détournent de plus en plus des partis politiques traditionnels et boudent les étiquettes. ». Sur le sujet même de l’abstention, bien qu’elle n’en prononce pas le terme, l’élue ultra-marine, issue du groupe communiste a déclaré que « Le désamour des français pour l’élection et pour la question politique en général s’explique davantage par une perte de confiance, le sentiment de ne pas être entendu et d’être représenté par une caste politique éloignée de leurs préoccupations« .
Le MoDem, Erwan Balanant, est également allé sur le terrain de l’éloignement des français pour la politique. A l’inverse d’Emeline K/Bidi, il n’a pas parlé de désamour, pointant un désintérêt des françaises et des français, terme moins « négatif ». Sans que le terme n’ait été prononcé, nous pouvons voir ici une référence autour de la transparence de la vie publique et de l’incompréhension plus globale autour de la fonction de certains élus, comme cela a pu être remarqué au moment des élections départementales et régionales.
La Présidence sur la balance des pouvoirs
La Constitution de la Cinquième République et l’équilibre des pouvoirs sont régulièrement revenus. Que ce soit les promoteurs de la proportionnelle intégrale, les défenseurs d’une simple dose ou enfin les partisans d’un statu-quo, tous ont mis en avant ce sujet.
Les interventions de Emeline K/Bidi, Raquel Garrido et Jérémie Iordanoff, tous issus de la NUPES, sont du côté d’une critique du système actuel. L’élue insoumise francilienne, en motivant son rejet du texte qui n’aborde que la proportionnelle, a parlé de réforme globale de notre démocratie, citant par exemple le 49-3 : « C’est donc là qu’il faut agir avec une série de mesures, une série de modifications de la démocratie française qui véritablement nous font sortir de la monarchie présidentielle. »
Si l’élu écologiste a lui aussi critiqué ce rôle du Chef de l’Etat, il a souligné également qu’au fur et à mesure, il s’était opéré un « glissement » qui « rend fragile le régime lui-même« .
Tout en critiquant le système actuel, Emeline K/Bidi ne partage pas entièrement les solutions de ses partenaires écologiste et insoumis : « Enfin, en faisant le jeu des grands partis, la proportionnelle ne garantit pas de lutter contre l’hyper-présidentialisme de notre régime actuel« .
A l’inverse de la gauche de l’hémicycle, Didier Lemaire et Xavier Breton se sont positionnés sur la défense de la Constitution de 1958. Le représentant de Les Républicains considérant que « cette réforme va à l’inverse de l’esprit de la Cinquième République« . Ce dernier, tout comme Didier Lemaire d’Horizons, ont parlé à plusieurs reprises de la question de la stabilité que permettrait la Constitution de la Cinquième République avec le scrutin majoritaire pour expliquer leur refus d’introduire la proportionnelle intégrale.
=> En réponse, Bruno Bilde a répondu « Concernant la stabilité, il faut bien avoir à l’esprit que les institutions de la Cinquième ont été conçues pour permettre au gouvernement d’agir même en l’absence de majorité absolue comme nous le montre d’ailleurs la situation actuelle« .
Citoyens et territoires
Au-delà de l’abstention, de la confiance ou encore de notre Constitution, les différents orateurs ont régulièrement parlé du « lien privilégié » comme le dirait Jean-Louis Bricout entre le député et ses électeurs. Sans surprise, ce point a été abordé par les détracteurs du système proportionnel intégral et par certains défenseurs d’une simple dose. L’élu picard a à cette occasion défini ce que voulait dire être un élu de terrain. Nous souhaitons souligner à cette occasion qu’il n’y a pas incompatibilité entre une élection à la proportionnelle et une proximité avec le terrain et inversement une élection au système majoritaire n’est pas nécessairement corrélée au dit lien privilégié avec le terrain ; c’est au choix du représentant.
Au-delà de l’élu LIOT, cet argument a été abordé à droite de l’hémicycle avec Xavier Breton parlant du « risque d’éloignement que propose le texte. Vous passez d’abord d’une circonscription à un département.« , à gauche avec Cécile Untermaier « soient [listes régionales] le reflet d’une qualité et d’une écoute citoyenne et d’une bonne représentativité connaissant la difficulté pour les conseillers régionaux de se faire connaître sur le territoire » mais également au sein de la majorité-minorité présidentielle avec Lemaire parlant de « choisir des gens plutôt que des partis« .
Emeline K/Bidi s’est également positionnée sur le sujet en abordant notamment le sujet sur une base géographique et d’envergure territoriale. Pour l’élue réunionnaise, la proportionnelle entraînerait des élus « hors sol » avec des territoires beaucoup trop étendus.
De manière rapprochée, la question des territoires et des circonscriptions départementales a été abordée lorsque Xavier Breton a parlé du choix que pourraient effectuer les partis politiques dans la désignation de leurs candidates et de leurs candidats pour occuper les différentes places des listes départementales. Son inquiétude portait sur les zones rurales qu’il craint qu’elles soient exclues afin que soient plus mis en avant des représentants des grandes villes du département. Nous souhaitons noter que cet argument peut également être utilisé pour le système actuel et que les investitures sont à la discrétion des partis.
=> En réponse aux critiques, Bruno Bilde a dit la chose suivante « Concernant la proximité, le fait de prendre les départements pour circonscription répond à l’objection. Je rappelle notamment à nos collègues des Républicains que 73% des sénateurs sont élus au scrutin de liste au niveau départemental. Personne ici n’oserait remettre en cause leur attachement et leur connaissance des territoires.« . Il a à cette occasion utilisé le terme d’apparatchik.
Proportionnelle, proposition et positions
Avant d’aborder plus longuement les différentes prises de position sur la proportionnelle et la proposition de loi, parlons du cas de la Seizième Législature. Le républicain Xavier Breton et l’écologiste Jérémie Iordanoff ont relevé que la composition de l’Assemblée nationale sous cette Seizième Législature se rapprochait d’un système à la proportionnelle. Il est exact que l’absence de majorité absolue, l’arrivée du Groupe Rassemblement National ainsi que l’existence de plusieurs autres groupes d’oppositions « conséquents », nous rapproche de la proportionnelle. Comme le dit Xavier Breton, nous sommes dans « une certaine proportionnelle« . Il s’agit ici cependant du constat d’un détracteur de la proportionnelle, d’un partisan du statu-quo, comme nous le verrons par la suite et dont on a déjà présenté certains arguments.
A l’inverse, du côté du promoteur de la proportionnelle Jérémie Iordanoff, nous disposons d’un rappel nécessaire. Nous nous rapprochons d’une législature à la proportionnelle mais cela s’est fait bien malgré le système majoritaire : la situation est « accidentelle« .
La position des groupes
Durant les échanges, nous avons pu trouver une grande diversité de positionnement. Promotion de la proportionnelle intégrale, préférence de la dose de proportionnelle, défense du statu-quo. Toutefois, à l’exception du Groupe Rassemblement National, la proposition de loi n’a recueilli les faveurs d’aucun autre groupe. Nous allons regarder par ordre décroissant du nombre de députés, les différentes positions.
Le Groupe Renaissance soutient le principe proportionnel, sous la forme de dose « La proportionnelle à petite ou grande dose est sans doute une brique essentielle » mais a donc voté contre la proposition de loi. Il fait partie des groupes défendant ce débat pendant la commission transpartisane sur la refondation des institutions.
Le Groupe Rassemblement National, à l’origine de la proposition de loi, était donc tout à fait favorable au texte et à cette forme de proportionnelle. Il est important de noter qu’à l’issue des interventions successives précédant l’examen rapide des articles (qui ont tous été supprimés), le rapporteur de la loi a souligné un point crucial : la proportionnelle départementale bien que dite intégrale ne l’est pas pleinement. Il l’a exprimé une fois de manière claire et nette « Ce n’est pas une proportionnelle intégrale puisque la majorité des départements comptent moins de trois députés. » et une autre fois de façon plus détournée « En l’occurrence, il y aura souvent moins de 5 sièges à pourvoir puisque 70 des 107 départements ont moins de 5 députés soit 75%. Les listes seront donc courtes et tous les candidats devront être pleinement engagés.« . Ce soutien au principe proportionnel s’est également vu dans les propos de Béatrice Roullaud « Le système proportionnel assurerait une meilleure représentativité et de fait beaucoup plus juste et démocratique« .
Si le Groupe La France Insoumise avait déposé par le passé une proposition de loi identique, le groupe a toutefois voté contre. Les députés insoumis soutiennent donc le principe proportionnel mais souhaitent que d’autres réformes démocratiques soient entreprises dans le même temps pour « donner plus de pouvoirs aux citoyens » comme le souligne l’oratrice Raquel Garrido.
Le Groupe Les Républicains est le seul à avoir exprimé son opposition au principe même de la proportionnelle. En témoignent les amendements que différents députés du groupe ont déposés : seize amendements de suppression (quatre par article) auxquels se sont ajoutés d’autres amendements visant à modifier le titre du texte en mettant par exemple en avant des critiques. Dans la justification du vote contre, il y a le lien avec les citoyens et la Constitution de la Cinquième République « parce que cette réforme va à l’inverse de l’esprit de la Cinquième République et avec le risque d’éloignement qui serait aujourd’hui préjudiciable pour notre démocratie que nous nous opposons à cette proposition de loi« .
Concernant le Groupe Démocrate, il y a ici un des défenseurs historiques du principe proportionnel. Comme les députés insoumis, ils ont par le passé déposé une proposition de loi identique au Rassemblement National et début 2022, ils ont fait adopter une résolution dans le cadre de leur niche. Erwan Balanant a indiqué que « Le Groupe MoDem ne votera pas ce texte, si nous l’avions retiré c’était pour une bonne raison, c’était pour que le travail soit plus global« .
Pour le Groupe Socialiste, nous avons ici des promoteurs d’une dose de proportionnelle, Cécile Untermaier soulignant que « Notre groupe est favorable à une dose de proportionnelle« . S’opposant au texte, l’élue socialiste dans sa conclusion a apporté des alternatives qu’il est important de noter. Ses derniers propos ont été pour évoquer le système allemand, mêlant scrutin majoritaire et listes à la proportionnelle. Pourtant, du fait que les listes servent à compenser les élections dans des circonscriptions, l’Allemagne doit être catégorisée parmi les pays étant à la proportionnelle intégrale.
Le Groupe Horizons est également à classer dans les défenseurs d’une dose de proportionnelle « Ainsi pourrait être instauré un mécanisme de proportionnelle nationale ouvrant un certain pourcentage, 15, 20% des sièges à ce mode de scrutin« . Didier Lemaire a motivé le vote contre par la nécessité de « majorités stables puissent émerger afin que l’action publique puisse éviter toute situation de blocages« .
Avec le Groupe Ecologiste, nous avons des défenseurs de la proportionnelle « un sujet sérieux, un véritable enjeu démocratique« , Jérémie Iordanoff rappelant que les écologistes sont dans une « tradition parlementariste ». Leur rejet de la proposition de loi vient ici du groupe la défendant, de sa méthode et de ses idées « Le Groupe écologiste se refuse d’être l’instrument de votre petit jeu, celui de se donner l’apparence de la respectabilité, l’apparence de défenseurs de la démocratie quand votre projet est au contraire fondamentalement antiparlementariste, autoritaire, illibéral.« . Une opposition non pas au fond de la loi mais à sa forme.
A nouveau avec Groupe Gauche démocrate et républicaine, nous naviguons dans les eaux de la dose de proportionnelle, Emeline K/Bidi indiquant « nous ne rejetons pas en bloc le scrutin proportionnel« . Dans son intervention, nous pouvons noter un élément particulièrement intéressant et qui n’est que peu évoqué : le calendrier d’élection pour les législatives. Dans ses propos sur la puissance du pouvoir exécutif, elle aborde cette thématique « il faudrait pour cela par commencer par décorréler l’élection présidentielle de l’élection législative« .
Avec le Groupe Libertés, Indépendants, outre-mer et territoires nous sommes dans un entre-deux avec des éléments indiquant un semblant de préférence pour la dose, d’autres pour le statu-quo et d’autres pour une absence de position. Nous retiendrons cet élément « Certains veulent aller vers une proportionnelle totale, par départements, par régions, d’autres préfèrent une dose de proportionnelle voire une démocratie participative. Lui, le groupe LIOT pense que la question mérite d’abord un véritable débat, pas un échange à l’emporte-pièce et bien au contraire des discussions approfondies« . Ce groupe est donc le 9ème parmi les 10 à s’être exprimé contre la proposition de loi.
En conclusion, deux moments sont désormais à retenir : la mi-janvier pour voir si les députés auront le temps de débattre en intégralité ou au moins en partie de cette proposition de loi et le moment où siégera la commission transpartisane afin d’observer ce qui se dira sur la proportionnelle et ce qui en sortira.