Ce texte a été écrit à l’occasion des élections régionales de 2021.
Nous appelons au lancement d’une réflexion sur l’uniformisation des modes d’élections de nos différents élus à travers l’instauration de la proportionnelle intégrale afin d’apporter non seulement de la cohérence et de la clarté et mais également une juste représentation des électeurs à l’échelle du territoire concerné.
D’ici quelques semaines, les 20 et 27 juin, auront lieu les élections régionales et nous renouvellerons ainsi nos élus régionaux de métropole et d’outre-mer. A cette occasion, nous souhaitons lancer le débat sur l’équité du scrutin utilisé. S’il existe des débats autour des modes de scrutin, ceux-ci ne sont relatifs qu’aux élections législatives. Des médias aux institutions en passant par les partis et les experts/juristes/politologues, une modification du mode de désignation des élus municipaux, départementaux ou régionaux n’est qu’exceptionnellement évoquée.
En écartant les élections sénatoriales au suffrage indirect et les élections intercommunales ayant un régime particulier, nous comptons six élections auxquelles l’ensemble des françaises et des français peuvent participer : présidentielle, législatives, municipales, départementales et régionales, européennes. Scrutin proportionnel intégral à un tour, scrutin proportionnel à deux tours avec prime majoritaire de 50% des sièges, scrutin uninominal majoritaire à deux tours avec seuil à 12,5%, scrutin proportionnel à deux tours avec prime minoritaire de 25% des sièges… La diversité est réelle et nuit à la bonne compréhension des électeurs.
Les conseils régionaux ont été créés en 1986. Lors des premières élections régionales, en 1986, 1992 et 1998, un mode de scrutin proportionnel a été utilisé, avec des listes départementales. Mais depuis 2004, un autre système est utilisé, qui présente une grande complexité, avec différents seuils arbitraires et le besoin d’organiser deux tours, et un manque de représentativité criant. Durant le mandat 2015-2021, dans deux grandes régions, seules deux listes ont été représentées au sein du conseil régional. De ce que nous voyons des sondages régionaux actuels, de nombreuses régions vont être dirigées par des majorités en trompe-l’œil, issues de listes ne rassemblant qu’une minorité des votants (sans même évoquer l’ensemble des électeurs potentiels, puisqu’une forte abstention est malheureusement à prévoir).
La prime majoritaire n’a aucune justification démocratique. Certes, depuis un siècle elle a été utilisée dans plusieurs pays, mais dorénavant elle n’existe plus que dans quelques lieux (quelques conseils régionaux italiens, quelques parlements locaux argentins, très légère prime à Saint-Marin). Elle a été introduite de manière récente pour les conseils régionaux français, sous prétexte d’un besoin de stabilité, alors que de 1986 à 2004 peu de “remous” ont été constatés. Cette prime casse le principe même du scrutin proportionnel, en empêchant chaque liste d’obtenir le nombre de sièges qu’elle mérite par le vote des électeurs. Nous pensons donc qu’il faut purement et simplement supprimer cette prime.
Les deux tours constituent également une anomalie dans un scrutin proportionnel. Ils favorisent les manœuvres politiques de différentes manières, en éliminant les petites listes et en encourageant des tambouilles électorales peu appréciées des citoyens. Ils découragent aussi certains électeurs, puisqu’il faut se déplacer deux semaines de suite pour voter.
Les vrais scrutins proportionnels (à un tour et sans prime majoritaire) sont la norme lors des élections régionales des autres pays modernes. En Allemagne, les députés des différents länder sont élus à la proportionnelle intégrale (avec double vote comme au niveau fédéral). Aux Pays-Bas, les membres des assemblées provinciales sont élus à la proportionnelle intégrale (sans seuil, comme au niveau national). En Espagne, les membres des parlements des communautés autonomes sont élus à la proportionnelle intégrale. Nous pourrions donner de nombreux autres exemples.
Nous savons évidemment qu’il est bien trop tard pour changer les règles pour ces élections. Mais nous demandons que ce sujet soit réfléchi par les candidats, par les partis, et par les citoyens. C’est un sujet sérieux qui devrait faire partie des futurs programmes présidentiels et législatifs.